INTELLIGENCE RELATIONNELLE®
Comprendre la théorie polyvagale : écouter son corps pour mieux se réguler
Le corps parle souvent avant les mots. Il réagit à ce qui est perçu, parfois en une fraction de seconde.
La théorie polyvagale, élaborée par Stephen Porges, aide à comprendre comment ces réactions automatiques sont liées à des états physiologiques anciens, profondément humains et porteurs de sens.
Cette compréhension est une clé précieuse pour avancer vers un apaisement durable.
Un système au service de la survie
Le système nerveux autonome agit en continu, sans que l’on ait besoin d’y penser.
Son rôle est de scanner l’environnement pour répondre à une question centrale :
« Suis-je en sécurité, ou suis-je en danger ? »
Et d’adapter notre état intérieur en conséquence, sans passer par la pensée consciente.
Ce processus d’évaluation automatique, qui repose sur les signaux du corps, s’appelle la neuroception.
Il ne passe pas par le raisonnement : c’est une détection non consciente de la sécurité ou de la menace, activée par des indices subtils (voix, posture, ton, ambiance...).
Trois réponses, trois états physiologiques
Le système nerveux dispose de trois voies principales, apparues successivement au fil de l’évolution.
Chacune correspond à un état physiologique et à une façon d’exister dans le monde.
Ces trois états s’organisent en hiérarchie : on ne passe pas d’un état à l’autre au hasard, mais selon une logique évolutive.
L’état ventral du nerf vague (200 millions d’années) : sécurité et connexion
C’est l’état le plus récent.
Quand il est activé, le corps entre dans un état d’ouverture : calme, curiosité, envie de lien.
Les ressources relationnelles, cognitives et émotionnelles sont pleinement disponibles.
Cet état favorise la connexion sociale, la coopération et la régulation naturelle du stress.
L’état sympathique (400 millions d’années) : alerte et mobilisation
En présence d’un danger perçu, le système nerveux active une réponse de fuite ou de lutte.
Le corps se mobilise :
rythme cardiaque accéléré, tension musculaire, respiration courte, hypervigilance...
Cet état est adapté à l’action, mais s’il dure, il devient épuisant.
Il peut se manifester par de l’anxiété, de l’irritabilité ou une agitation intérieure.
L’état dorsal du nerf vague (500 millions d’années) : figement et repli
Lorsque le danger semble trop intense ou inévitable, le système se met en mode figement.
Il s’agit d’une protection extrême, apparue très tôt dans l’évolution.
Ralentissement, engourdissement, déconnexion, sensation de vide, perte d’élan vital...
Le corps se coupe pour ne plus sentir. C’est une stratégie de survie face à l’impuissance.
Le cerveau du haut et le cerveau du bas
Ces états sont liés à ce que le Dr François Ledoze appelle :
-
Le cerveau du haut : langage, raisonnement, pensée consciente
-
Le cerveau du bas : tronc cérébral et corps, réflexes automatiques, mémoire implicite
Le cerveau du bas réagit toujours en premier.
Par exemple, face à un danger perçu (même inconsciemment), le corps peut répondre avant même que les mots arrivent :
cœur qui s’emballe, gorge nouée, respiration saccadée, sensation de blocage…
Et même si le danger n’est plus là aujourd’hui, le corps peut continuer à réagir comme si c’était encore le cas.
C’est ce qu’on appelle une réaction de mémoire implicite, souvent inconsciente.
Le corps comme porte d’entrée en thérapie
En thérapie, les sensations corporelles sont souvent le point de départ du travail.
Une question simple comme :
« Que se passe-t-il dans ton corps en ce moment ? »
permet de repérer dans quel état se trouve le système nerveux.
Deux grandes tendances peuvent émerger :
-
Le corps s’exprime : tension, chaleur, émotion → activation sympathique
-
Le corps ne ressent rien : vide, flottement → activation dorsale
Aucun de ces états n’est "mauvais".
Chacun a été, à un moment donné, une stratégie de protection utile et intelligente.
Les identifier, les accueillir, les nommer, c’est déjà commencer à les réguler.
Retrouver de la souplesse
L’objectif n’est pas d’être toujours “zen” ou en ventral.
Le but est de retrouver une souplesse, une capacité à passer d’un état à un autre selon les situations, sans rester figé.
Un système nerveux en bonne santé sait se mobiliser, se calmer, se protéger, se reconnecter.
La régulation se fait en lien
Le système nerveux apprend à se réguler en relation.
La simple présence d’une personne régulée, stable et bienveillante peut envoyer au corps un message puissant :
“Tu n’es plus seul, tu peux souffler.”
C’est ce qu’on appelle la co-régulation.
En thérapie, cette relation soutenante peut offrir une expérience neuve, et parfois profondément réparatrice.